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ils saisissent le coupable et l’étendent tout de son long, le visage contre terre ; ils tirent ses hauts-de-chausse jusque sur ses talons. Dans cette posture, ils lui donnent autant de coups sur les fesses que le mandarin a jeté de petits bâtons : cependant on observe que quatre coups sont comptés pour cinq ; ce qui s’appelle le coup de grâce de l’empereur, qui, en qualité de père tendre et pitoyable, diminue toujours quelque chose du châtiment. Mais les coupables ont un autre moyen de l’adoucir ; c’est de gagner les exécuteurs, qui ont l’art de ménager leurs coups avec une légèreté qui les rend presque insensibles. Ce supplice est quelquefois si violent, qu’on peut en mourir ; mais ce qui peut faire voir jusqu’où est portée, à la Chine, la passion pour l’argent, c’est que pour une somme on loue des hommes qui subissent le châtiment à la place du coupable.

Un mandarin a le pouvoir de faire donner la bastonnade non-seulement dans son tribunal, mais dans tout autre lieu de sa juridiction : aussi ne marche-t-il jamais sans un cortége de ses officiers de justice, qui portent le pan-tsé. Si quelque personne du peuple reste à cheval lorsqu’il passe dans une rue, et ne se hâte point de descendre ou de se retirer, c’est assez pour s’attirer cinq ou six coups par son ordre. Cette exécution se fait si vite, qu’elle est souvent finie avant que les voisins s’en aperçoivent.