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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/304

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Après avoir rendu d’immenses services à la France et à l’Angleterre, leurs patries, contre les Espagnols du Nouveau-Monde, les derniers Frères de la Côte, voyant que les nouveaux traités internationaux abolissaient l’ancien droit de courses et déprédations au delà de l’Île-de-Fer, ne se résignèrent point tous à la vie paisible de colons.

La piraterie se recruta dans les rangs de ces formidables corsaires, qui, après avoir écumé les eaux des Antilles, se repliaient vers l’Afrique, visitaient les Açores, les îles du Cap-Vert, la Guinée ou même les Indes Orientales, et enfin se retiraient, le plus souvent, à Madagascar pour y jouir impunément du fruit de leurs rapines.

Les compagnons d’un certain capitaine Tew, entr’autres, après avoir écumé les mers de l’Afrique et des Indes, descendirent sur la Grande-Île, où ils devinrent bientôt très puissants, quoique leur chef fût retourné aux Bermudes, où il obtint sa grâce.

Les documents historiques relatifs à la domination des flibustiers à Madagascar sont très obscurs, Un historien digne de foi a écrit cependant qu’ils y fondèrent une colonie, qui aurait pu devenir très utile à l’humanité si elle avait commencé sous d’autres auspices ; mais ils étaient ennemis de leurs compatriotes, ils devinrent les tyrans des insulaires, se renfermèrent dans leurs citadelles et y périrent sans laisser aucune trace intéressante de leur résidence sur ces bords.

En s’établissant à Madagascar, ils ne songèrent qu’à satisfaire leurs appétits souvent féroces ; ils achetèrent un grand nombre d’esclaves, ils en enlevèrent de vive force aux princes leurs voisins ; la guerre s’ensuivit. L’avantage des armes à feu suppléant au nombre, les pirates l’emportèrent d’abord ; mais la crainte d’être surpris en rase campagne les contraignit à convertir leurs habitations en autant de forteresses. Ils y vécurent avec une magnificence asiatique, exerçant une autorité souveraine et se faisant rendre par les naturels des honneurs presque divins. – De là, comme de plusieurs autres traits analogues, les légendes semblables à celle de Nathan-la-Flibuste, le Dieu d’ébène.