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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/43

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affaire à un officier du roi de France ou à un pasquin déguisé en capitaine de frégate ?

Le baron de Luxeuil frémit de colère à cette apostrophe :

— Faquin !… pirate insigne !… hâbleur !…

— Le faquin, c’est vous !… Et tôt ou tard, votre épée se mesurera contre la mienne !… Aujourd’hui, votre devoir est de m’entendre…

— Mon devoir serait de vous faire pendre à l’instant, si…

— Voici un si qui me rassure un peu, pensa le chevalier.

— Si j’étais commandant en chef, ajoutait le baron en rugissant de fureur.

Béniowski, pâle et se contenant à grand’peine, garda le silence.

Les officiers français s’entre-regardaient sans se permettre de donner aucune marque d’approbation ni d’improbation. Au fond, la plupart d’entr’eux blâmaient leur commandant, dont l’insolente légèreté convenait mal dans une circonstance où il s’agissait de vie ou de mort.

— Sans les ordres du commandant Cerné de Loris, continuait le baron de Luxeuil, tu achèverais tes contes à bout de vergue, insigne coquin !…

— Mordious ! grommelait le seigneur de Madagascar, le dicton des frères de la côte me chagrine fort à l’heure qu’il est… Ce museau rose nous ferait pendre sans autre forme de procès… Il n’entend rime ni raison… et j’ai grand’peur que M. Cerné de Loris n’entende raison ni rime.

— Sachez, maître forban, que vous êtes condamné d’avance !… Nous avons à bord la relation complète de vos prouesses à Formose, aux Îles Pouhou et ailleurs ! Vous déshonorez la France par vos brigandages…

— La France est déshonorée d’être représentée par des gens tels que vous ! répliqua Béniowski avec véhémence.