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Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/52

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ger parlât le français comme je le parle, il s’est raillé de moi dès l’abord, a traité avec peu de respect la mémoire de mon auguste parente feue Marie Leczinska, reine de France, et m’a injurié violemment dès que j’ai essayé de ramener notre conférence à des termes sérieux. Aussi ai-je protesté au nom du roi… J’en appelle à tous les gens du bord…

— Ces faits seront éclaircis, dit le président.

Le baron de Luxeuil pâlit de colère.

Béniowski dut reprendre au début toute l’histoire de sa vie : il parla de son intimité fraternelle avec le vicomte Richard de Chaumont-Meillant, de ses navigations avec lui, de son mariage, du soulèvement patriotique de la Pologne et de la mission du major Windblath. Il en vint rapidement ainsi à la relation de la journée du 19 mai 1768 :

— Le combat touchait à sa fin, dit-il, j’étais sûr de vaincre ; déjà le vicomte de Chaumont, qui venait de se conduire en héros, déclarait la partie gagnée, et avec sa gaieté ordinaire, divertissait tout mon état-major, quand Windblath, pâle et consterné, nous annonce l’arrivée d’un corps d’armée russe, qui menace de nous couper la route. – Un fort parti de Kosaques et de hussards ennemis se dirige au grand galop sur notre arrière-garde. Je rallie moi-même mes troupes pour marcher à leur rencontre ; mais, ce mouvement en apparence rétrograde, intimide nos jeunes soldats. Les fuyards russes, ne se voyant plus poursuivis, ont le temps de se reconnaître ; ils se reforment en bon ordre ; nous sommes pris en flancs. – Je manquais d’infanterie et d’artillerie. Il était impossible de se former en carré ; notre succès même m’avait fait perdre l’avantage du terrain. – Le vicomte, mon officier d’ordonnance, reçoit ordre de diriger un retour agressif contre les fuyards ralliés. – Accompagné de Windblath, je m’élance sur les Kosaques. Notre cavalerie les force à reculer ; mais c’était