Page:La Morlière - Les Lauriers ecclésiastiques.djvu/100

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core d’assez bon aloi en cette occasion : je fis un vrai coup de théatre, je jouai le surpris, l’anéanti, le confondu ; je m’attristai par dégrés, & bientôt je devins d’une mélancolie affreuse, je pleurai même, car c’est un don que je possedois, j’avois les larmes à commandement, & c’est un point essentiel, & peut-être une des amorces les plus adroites par où on puisse prendre les femmes ; on me fit des questions sur mon état, on parut s’y intéresser, je soupirois avec un air hipocrite, je ne répondois point, mais je me faisois une violence extrême pour ne point éclater de rire : enfin elle me parut s’attendrir, & elle voulut sçavoir absolument quelle étoit la cause de ce chagrin si subit ; je lui dis enfin d’un ton de tartuffe, que je n’attribuois qu’à mon étoile l’avanture desespérante qui m’arrivoit, sans l’en rendre en aucune façon responsable, elle me con-