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Page:La Nature, 1873.djvu/144

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LA NATURE.

sèche un peu, et le vent, qui souffle presque toujours de la mer, en jette sur la plage. Ainsi se forment les dunes, ces monticules sablonneux, qui, si l’industrie de l’homme ne parvient à les fixer par des végétaux convenables, marchent lentement mais invariablement vers l’intérieur des terres. Quand au contraire, la côte est élevée, la mer qui n’y peut rien rejeter y exerce une action destructive ; ses vagues en rongent le pied et en escarpent toute la hauteur en falaise, parce que les parties plus hautes, se trouvant sans appui, tombent sans cesse dans l’eau ; elles y sont agitées dans les flots jusqu’à ce que les parcelles les plus molles et les plus déliées disparaissent. Les portions plus dures, à force d’être roulées en sens contraires par les vagues, forment ces galets arrondis ou cette grève qui finit par s’accumuler assez, pour servir de rempart au pied de la falaise. (Cuvier).

Pour avoir une juste idée de la force destructive des flots de l’Océan, il suffit de les observer, pendant la tempête au sommet d’une falaise du cap Blanc-Nez. L’impétueuse armée des vagues se jette à l’assaut de la muraille de pierre, avec une épouvantable fureur ; on entend de terribles mugissements produits par ce combat de l’élément liquide, contre la terre ferme. Celle-ci est toujours vaincue dans la lutte ; des éboulements se produisent sous le jeu de cette action puissante ; des pans de rochers s’écroulent et après la tourmente la mer les divise, les arrondit en galets.

Les rochers du cap Gris-Nez.

Le Blanc-Nez et le Gris-Nez, sont deux promontoires, situés à côté l’un de l’autre, au nord de la France, entre Boulogne et Calais. Ils sont formés de magnifiques falaises, peu connues du touriste, et cependant les plus imposantes peut-être que présentent les côtes françaises. Le géologue y trouve un remarquable exemple des évolutions lentes du globe, sous l’action des vagues de l’Océan. Un effet, le pas de Calais ne cesse pas de s’élargir depuis des siècles ; et d’après les observations de M. Thomé de Gamond, la falaise du Gris-Nez recule environ de 25 mètres par siècle.

Les deux caps Blanc-Nez et Gris-Nez sont formés de roches calcaires, qui appartiennent au terrain oolithique supérieur ; on y trouve un grand nombre d’empreintes de coquillages fossiles, notamment des ammonites d’une dimension considérable. Quelques-unes d’entre elles, beaucoup plus petites, sont formées de pyrite de fer qui abondent surtout dans le calcaire du Blanc-Nez. Cette pyrite s’y rencontre partout dans la masse rocheuse soit en minces filons, soit en rognons de la grosseur d’une noix ; quand on brise ces rognons, on en dévoile la remarquable constitution ; ils sont formés d’aiguilles de sulfure de fer, qui rayonnent autour d’un centre, et affectent un éclat particulier. Leur couleur est d’un beau jaune métallique, et les pêcheurs ignorants, de la localité, sont persuadés que ces minéraux contiennent de l’or. Le soufre et le fer sont cependant leurs seuls éléments constitutifs.

Le cap Blanc-Nez, dont notre gravure, faite d’après nature, donne une représentation exacte, forme une vaste muraille, qui n’a certainement pas moins de 2 kilomètres d’étendue. Son point culminant est situé à deux cents mètres au-dessus du niveau de la basse mer. Le calcaire, qui en constitue la masse, est