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Page:La Nature, 1873.djvu/382

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LA NATURE.

tionnant sous l’immense dôme tournant de notre Observatoire, le plus immense dôme qui existe, et on la voit encore aujourd’hui dessinée dans l’Astronomie populaire. Mais le dôme est resté solitaire, et sa plus grande curiosité en ce moment est d’être admirablement constellé d’étoiles par les innombrables balles de chassepot qui l’ont criblé aux derniers jours d’agonie des convulsions de la Commune.

Il y a aussi à l’Observatoire deux disques de flint et crown pour un objectif, qui ne mesurent pas moins de 75 centimètres de diamètre, mais qui ne sont pas assez purs pour être travaillés. Ce sont les plus grands qui existent.

La plus puissante lunette de l’Observatoire de Paris est le grand équatorial de la tour de l’ouest, coupole blanche qui fait à peu près le pendant du dôme dont nous venons de parler. Comme instrument de précision, c’est l’un des plus parfaits qui existent au monde. L’objectif est une lentille de 32 centimètres d’ouverture et de 5 mètres de distance focale. Monté sur un pied parallactique, un mouvement d’horlogerie le fait tourner autour de l’axe du monde, en sens contraire du mouvement de la terre, de sorte que, dirigé vers quelque point du ciel que ce soit, la lunette garde constamment l’astre dans le champ de la vision et le suit dans son cours apparent. La coupole tourne elle-même, et l’astronome semble faire exception à la loi universelle qui emporte le ciel, car il reste immobile comme si le globe tournait sous ses pieds sans qu’il participe à son mouvement. Ce magnifique équatorial a été construit par Secrétan et installé en 1860. Il a coûté 50 000 francs, prix auquel il serait impossible de le reconstruire actuellement.

La grande lunette méridienne, construite en 1863 par Secrétan au prix de 35 000 francs, est un autre chef-d’œuvre de précision. C’est la plus grande lunette méridienne qui existe. Son objectif est de 25 cent., sa longueur est de 3m,85.

L’équatorial de l’Observatoire du Collège romain, à l’aide duquel le P. Secchi a fait ses brillantes découvertes, a été construit en 1854 par Mertz, de Munich. Son objectif est de 24 centimètres et sa longueur de 4m,32. Les oculaires s’étendent jusqu’à 760 et 1 000. Le savant astronome romain lui a appliqué un puissant spectroscope pour l’étude spéciale du Soleil ; plusieurs fois à Rome j’ai été appelé à contempler les protubérances, jets de flamme de trente et quarante mille lieues de hauteur qui s’élancent constamment autour de cet astre gigantesque, comme les vagues colossales d’effroyables tempêtes.

De 1850 à 1860, plusieurs grandes lunettes ont été construites en France, par Porro et par Dien ; deux d’entre elles mesuraient jusqu’à 55 centimètres (Porro) et 52 (Dien) ; leur longueur était de 15 mètres pour la première et de 13 pour la seconde. Mais elles n’étaient pas plus puissantes que l’équatorial de 32 centimètres de l’Observatoire de Paris.

L’équatorial de M. Rutherfurd, à New-York, par lequel il a obtenu ses belles photographies de la lune a pour objectif une lentille de 33 centimètres d’ouverture. Il a été terminé en 1869.

En 1860, on a établi à l’Observatoire royal de Greenwich un grand équatorial de 32 centimètres d’ouverture. On peut le mettre sur le même rang que celui de Paris. Dans la description que le directeur de l’Observatoire d’Angleterre, M. Airy, a bien voulu m’adresser, il n’y a pas moins de 55 figures de précision sur les différentes pièces qui constituent cet instrument. Sa monture est toute différente de celle de Paris. Mais les deux instruments sont analogues et servent aux mêmes usages.

L’Observatoire de Chicago s’est fait construire, par Alvan Clark, une lunette dont l’objectif a un diamètre de 47 centimètres. L’Observatoire de Cincinnati possède une lunette équivalente. Nous ne pouvons encore rien dire de la supériorité de ces instruments, aucun fait astronomique important n’ayant signalé leur usage.

Une grande lunette a été construite en 1869 par Cook and Sons, fabricants d’instruments d’astronomie à York, pour un commerçant qui fait le plus noble usage de sa fortune, M. Newal, fabricant de câbles sous-marins, de Gateshead. Le tube, qui a la forme d’un cigare, a 32 pieds de longueur et 3 pieds 6 pouces de diamètre au milieu. Le verre de l’objectif a 25 pouces (63 cent. ½). Le pilier en métal sur lequel il est porté a 20 pieds de hauteur, et environ 6 pieds de diamètre à sa base. Gateshead n’est pas le lieu où il est destiné à rester toujours ; M. Newal a l’intention de construire à Madère un observatoire pour l’y établir.

Ajoutons encore que l’Observatoire national des États‑Unis vient de se faire construire la plus grande lunette qui existe. L’objectif a été fourni par Chance, de Birmingham. On l’a terminée et montée en Amérique. Il a 26 pouces anglais, c’est-à-dire 66 centimètres. L’instrument, installé en 1872, donne des images bien nettes avec un grossissement de 1 300. La dépense totale a été d’environ 50 000 dollars, ou 250 000 francs.

MM. Clark, de Cambridge (Massachusetts) ont entrepris, en 1872, l’exécution d’une lentille de 69 centimètres pour le gouvernement des États‑Unis, au prix de 50 000 dollars. La lunette dont elle fera partie ne sera pas installée dans une ville, mais sur une montagne, sur les plateaux élevés de la Sierra-Nevada à une altitude de 2 700 mètres, qui se recommande par la pureté de son atmosphère et par un ciel presque toujours sans nuages. Le professeur Davidson et le professeur Young ont étudié dans ce but la Sierra-Nevada et les montagnes Rocheuses.

C’est là le plus grand réfracteur construit jusqu’à ce jour. Si l’objectif est parfaitement réussi, on aura dans cet instrument la plus puissante lunette astronomique du monde. Sa longueur pourra ne pas dépasser 10 mètres. Les grossissements dont elle sera susceptible pourront atteindre 2 000.

Tels sont les plus grands instruments d’optique qui existent, télescopes et lunettes, réflecteurs et ré-