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Page:La Revue blanche, t18, 1899.djvu/543

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la République » en manière de fête et non plus pour la nécessité du ralliement.

Ce fut vraiment, comme l’a dit Me Morel, la fin de la « terreur tricolore ».

Cette opinion publique ainsi réveillée, redevenue saine, simple, vivace, n’en restera pas là. De même que la Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen, née de l’affaire Dreyfus, a déjà commencé à travailler pour d’autres réparations individuelles dues, ainsi l’opinion publique française, réveillée par l’affaire Dreyfus, va se trouver forte et vivante pour travailler à la réparation des injustices collectives, des injustices nationales. Dès à présent une politique étrangère sournoise comme l’était celle de M. Hanotaux est devenue impossible.

Dès à présent nous sommes assurés que cette opinion publique ne restera pas indifférente à ce coup d’État perpétré par le gouvernement du tsar sur les libertés politiques de la Finlande ; on sait que le gouvernement du tsar veut russifier l’armée finlandaise, décider de toutes les affaires communes à la Finlande et à la Russie, et, admirez bien ceci, décider quelles sont les affaires communes à la Finlande et à la Russie : on livrerait ainsi des libertés politiques nationales à un gouvernement étranger ; on livrerait la culture occidentale ; l’opinion européenne, plus que toute autre l’opinion publique française ne peut se désintéresser d’un tel débat, se refuser à une telle défense ; elle doit commencer par en appeler au tsar mieux informé, s’il est vrai, comme on nous l’affirme, que le tsar ait été circonvenu par des intrigues panslavistes.

Charles Péguy
LA CRISE ALLEMANDE

Ce titre ne prétend pas faire allusion seulement à la querelle qui s’est élevée entre le Cabinet germanique et le Reichstag à propos du renforcement des effectifs militaires. On peut dire sans exagération, que, depuis l’avènement de Guillaume II, c’est-à-dire depuis près de onze ans, l’Allemagne traverse une crise politique ininterrompue.

Le débat que la Commission du Parlement a provoqué sur l’accroissement du contingent en temps de paix ne portait que sur une adjonction de 7000 hommes : en lui-même, il offrait donc un minime intérêt. Il n’est qu’un épisode de la longue lutte qu’au lendemain même de son arrivée au trône, l’empereur actuel à soutenue sans trêve ni lassitude contre les prérogatives constitutionnelles des députés.

Cette fois, Guillaume II a cédé, du moins en apparence ; son chancelier, le prince de Hohenlohe, à déclaré, de sa petite voix timide et dépourvue d’accent, que le souverain consentait à la diminution provisoire des crédits militaires, mais il a ajouté que plus tard, avant l’expiration du quinquennat, il présenterait vraisembla-