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Page:La Revue blanche, t30, 1903.djvu/170

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II


Les procès criminels auxquels a donné lieu l’invention de la Mano Negra sont au nombre de trois, désignés par le nom du lieu où se passa le fait incriminé : procès de la Parilla, procès d’Arcos, procès des Quatre-Chemins. Quelques détails sur le premier feront connaître dans quel esprit tous les trois ont été instruits, conduits et jugés.

Le 4 décembre 1882, auprès du moulin de la Parilla, Bartolomé Gago Campos fut tué par son cousin Manuel Gago. Tous deux étaient membres de l’Association des Travailleurs, mais Bartolomé, blâmé pour avoir entretenu des relations avec la femme d’un compagnon, en avait été expulsé. De là, brouille, en particulier avec son cousin. Au jour dit, il rencontra ce dernier dans la campagne, en compagnie de Cristobal Fernandez Torrejon. Dispute, rixe, bataille, Bartolomé fut tué. Le meurtrier ou les deux meurtriers enterrèrent le corps sur place.

À propos de ce fait divers, qui avait entraîné la mort d’un homme, il fut fait cent arrestations. Le ministère public demanda quinze condamnations à mort et il en obtint sept, plus sept condamnations aux travaux forcés à perpétuité. Tous les condamnés bien entendus, étaient parmi les membres les plus actifs de l’Association des Travailleurs. Les pièces de ce premier procès ne nous sont pas parvenues. Mais une demande en Cassation ayant été introduite devant la cour suprême de Madrid, le ministère public près cette cour, don Manuel Azcutia, reprit la première accusation capitale contre les quinze accusés. Voici quelques passages de son discours. : il faut se souvenir que ces niaiseries ampoulées et féroces, ont été débitées devant le premier tribunal d’Espagne, en présence d’un auditoire lettré.

De quoi s’agit-il donc ?

Le Tribunal le sait déjà. Il s’agit de l’assassinat le plus horrible, le plus épouvantable, le plus inhumain et le plus impie que l’on ait noté dans les annales du crime, d’un assassinat où, à la préméditation la plus raffinée, la plus cruelle perfidie, se sont ajoutées les circonstances génériques aggravantes, le ministère public ne dira pas, avec le ministère public de la Audienca de Jerez de la Frontera, celle d’abus de supériorité, car il est, dans le cas présent, inhérent à la trahison, mais celle de l’exécution nocturne, dans un lieu désert, et en bande, avec ruse et tromperie ; il s’agit d’une société illicite et clandestine, d’un tribunal secret et mystérieux, dont les moyens d’action pour l’exécution de ses barbares et de ses iniques projets étaient le feu, le fer et le poison ; de sorte que ni le père ne pouvait se refuser à plonger le poignard