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Page:La Saga de Gunnlaug Langue de Serpent, trad. Wagner, 1899.djvu/34

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sant désormais et exclusivement sur le sol mouvant des idées, des aspirations, des goûts individuels des narrateurs, elle continue son évolution lente mais irrésistible. Pendant au moins deux siècles encore, sujette à toutes les fluctuations que subissent les tendances morales et intellectuelles chez des nations où l’imagination est toujours en éveil, la saga vit sur les lèvres du peuple, se modifie au gré de ses dispositions, et l’accompagne dans toutes ses migrations. C’est ainsi qu’elle se répand, par voie de tradition orale, dans la plupart des contrées du Nord et se transmet pendant une longue suite de générations.

Enfin arrive le jour où l’œuvre est mise par écrit. Il est des cas où l’histoire orale continue à circuler pendant quelque temps encore ; mais, d’une façon générale, on peut dire que la fixation par l’écriture l’arrête définitivement dans sa transformation et marque le terme de son évolution. C’est la seconde étape et la plus significative. L’écrivain fait son apparition. Cette rédaction des récits, faite plusieurs siècles après l’accomplissement des faits qui en constituent comme le tissu fondamental et immuable, est de la plus haute portée au point de vue historique et littéraire ; elle atteste un progrès important dans la vie intellectuelle des peuples scandinaves : l’usage de l’écriture basée sur l’alphabet latin.

Pour ce qui concerne spécialement la saga de Gunnlaug, toute une série de détails, notamment l’exactitude des indications relatives aux rapports de parenté, font supposer que les exploits des héros et les émouvantes péripéties dont leur vie est remplie, ont été l’objet de récits peu de temps après leur mort. Son origine première remonte donc à l’époque qui marque les confins du paganisme et du christianisme. Pendant deux siècles elle vit à l’état