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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/23

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

a vraiment bon air. Les sculptures dont elle est couverte apparaissent nettement et je les étudie avec passion. Il y a des chimères étranges, des têtes réjouies de moines, des grappes de raisins, des fruits en bouquets ; un motif gothique orne chacun des panneaux. Le dessus représente une danse de Bacchus, avec le gros Silène, qui, la panse pleine, se rit de vous, oh tonneliers ! Un groupe de bacchantes et de faunes échevelés entourent d’une danse vertigineuse le dieu Bacchus perché sur un tonneau. C’est joli, c’est vivant, malgré la grossièreté des lignes et les imperfections du dessin. Décidément, il faut que j’achète cette table.

Elle a un tiroir, ma table, un grand tiroir même ; j’emploie toutes mes forces pour l’ouvrir, mais je le crois ensorcelé ; pas moyen ! Encore un effort ; il a bougé ! Hardi, hue, tire, nom de Dieu ! Enfin.

Enfin, le tiroir est ouvert et j’y plonge un œil avide. Moi, je suis avide, et le tiroir aussi est à vide. Mais pourtant, dans le fond, cette chose blanche… Je tends une main (avide naturellement) et j’amène au jour un rouleau de papier ficelé, noir de poussière.