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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/235

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

ter d’où venait l’argent ? Pouvait-il croire que je vendais mon corps ? Absorbé par la science, il ne savait rien voir en dehors des problèmes qui occupaient son esprit et la vie lui était inconnue. Dans sa naïve confiance, il se figurait que je massais des vieilles dames très dévotes, confites en patenôtres, qui avaient des rhumatismes, ou bien des vieillards goutteux, membres du club de M. Bérenger.

Il ignorait tout, le pauvret : sadisme, masochisme, gynécocratie, tout cela, c’était du néant, de l’inexistant, pour lui, âme pure !

Et je ne me faisais aucune illusion. C’était fini, maintenant. Georges trompé ne voudrait plus de moi. Son pauvre amour trahi, bafoué, souillé par ce vieux, par cette ruine, et cela, pour de l’argent ! Quelle honte de me connaître, d’être mon amant.

Et j’avais fait de lui, du bon, du pur, du loyal étudiant, l’égal, le confrère de ces jeunes gens en casquettes qui rôdent autour des filles, le surin dans la poche…

Quand Georges revint, ce fut bref. Il entra, et ne daigna même pas me voir. Je voulus me jeter à son cou ; il me repoussa avec mépris… Je voulus protester, lui ouvrir mon cœur, il