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Page:Labé - Élégies et Sonnets, Sansot, 1910.djvu/50

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LOUISE LABÉ


N’estimez point que lon doiue blâmer
Celles qu’a fait Cupidon enflamer.
Autres que nous, nonobstant leur hautesse,
Ont enduré l’amoureuse rudesse :
Leur cœur hautein, leur beauté, leur lignage,
Ne les ont su preseruer du seruage
De dur Amour : les plus nobles esprits
En sont plus fort et plus soudein espris.
Semiramis, Royne tant renommee.
Qui mit en route auecques son armee
Les noirs squadrons des Ethiopiens,
Et en montrant louable exemple aus siens
Faisoit couler de son furieus branc
Des ennemis les plus braues le sang,
Ayant encor enuie de conquerre
Tous ses voisins, ou leur mener la guerre,
Trouua Amour, qui si fort la pressa,
Qu’armes et loix vaincue elle laissa.
Ne meritoit sa Royalle grandeur
Au moins auoir un moins fascheus malheur
Qu’aymer son fils ? Royne de Babylonne,
Ou est ton cœur qui es combaz resonne ?