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Page:Labé - Œuvres, t. 1-2, éd. Boy, 1887.djvu/62

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DÉBAT


de ſes afaires, il eſt à creindre, & quaſi inéuitable, qu’il ne ſoit cauſe dautant de vilenie, incommodité, & deſplaiſir, comme il ha eſté par le paſsé d’honneur, proufit, & volupté. Les grands qu’Amour contreingnoit aymer les petis & les ſugetz qui eſtoient ſous eus, changeront en ſorte qu’ils n’aymeront plus que ceus dont ils en penſeront tirer ſeruice. Les petis, qui aymoient leurs Princes & Signeurs, les aymeront ſeulement pour faire leurs beſongnes, en eſperance de ſe retirer quand ils ſeront pleinſ. Car ou Amour voudra faire cette harmonie entre les hautes & baſses perſonnes, Folie ſe trouuera pres, qui l’empeſchera : & encore es lieus où il ſe ſera ataché. Quelque bon & innocent qu’il ſoit, Folie lui meſlera de ſon naturel : tellement que ceus qui aymeront, feront touſiours quelque tour de fol. Et plus les amitiez ſeront eſtroites, plus ſ’y trouuera il de deſordre quand Folie ſ’y mettra. Il retournera, plus d’une Semiramis, plus d’une Biblis, d’une Mirrha, d’une Canace, d’une Phedra. Il n’y aura lieu ſaint au monde. Les hauts murs & treilliz garderont mal les Veſtales. La vieilleſſe tournera ſon venerable & paternel amour, en fols & iuueniles deſirs. Honte ſe perdra du tout. Il n’y aura diſcrecion entre noble, paiſant, infidele, ou More, Dame, maitreſſe, ſeruante. Les parties ſeront ſi inegales, que les belles ne rencontreront les beaus, ains ſeront coniointes le plus ſouuent avec leurs diſſemblables. Grands Dames aymeront quelquefois ceus dont ne daigneroient eſtre ſeruies. Les gens d’eſprit s’abuſeront autour des plus laides. Et quand les poures & loyaus