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Page:Laberge - Visages de la vie et de la mort, 1936.djvu/179

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VISAGES DE LA VIE ET DE LA MORT

ment. Délima était d’une humeur massacrante et, lorsqu’elle essuyait les assiettes après les repas, il lui arrivait d’en laisser tomber une sur le plancher. Cela la soulageait. Non, mais, ça durait-il longtemps cette maladie-là ? Son père s’était bien pressé d’aller la chercher à la taverne.

Puis ce fut le premier janvier. Malgré les dires du médecin, la malade entrait dans une nouvelle année.

Le docteur Casimir venait chaque après-midi.

— Une autre injection, ça va la stimuler, dit-il, lors de sa visite du Jour de l’An.

Ces piqûres et les remèdes accomplissaient des miracles. La vieille parlait maintenant, elle respirait facilement, son cœur accomplissait sa fonction sans trop d’efforts et elle reposait paisiblement dans son vieux lit recouvert d’un couvre-pieds multicolore.

— Demain midi, ordonna le docteur Casimir, vous lui ferez prendre un bon bouillon. Vous tuerez une poule et vous ferez une soupe au riz. Je viendrai la voir manger.

Le fermier Bardas tordit le cou à une poule et Zéphirine prépara le bouillon. À l’heure annoncée, le docteur Casimir était à la maison.

— Maintenant, fais la manger, dit-il.

Il souleva lui-même la tête de la vieille Caroline, prit l’oreiller du père Bardas et le plaça sous les épaules de sa patiente. Alors, Zéphirine prenant la soupe dans un bol se mit à la faire avaler par lentes cuillerées à la malade. La jeune accomplissait le geste que la mère avait si souvent fait autrefois alors que la fille était une enfant.

— C’est assez pour aujourd’hui, mais tu lui en donneras encore demain. C’est mon idée que la mère est sauvée. Tout ce qu’elle a besoin maintenant pour se remettre, c’est beaucoup de bons soins. Vous verrez qu’elle