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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/13

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esprits à l’innombrable lignée pour qui le concept de « surnaturel » est comme un épi vide, et qui y soupçonnent aussitôt duperie habile ou candide illusion. Mais il ne renonce pas pour autant à jouer l’émotion à propos de certaines sollicitudes attribuées aux dieux.

Les néo-platoniciens sentirent le dommage de ces oscillations. Ils essayèrent de réchauffer la dévotion païenne, de pénétrer la philosophie d’esprit religieux, de pallier par d’habiles exégèses les impuretés des mythologies. Mais, dans les pieux ajustements auxquels ils s’employaient, ils firent preuve d’un zèle indiscret qui souvent dépassait le but. L’auteur du traité des Mystères ne découvre-t-il pas un sens édifiant au culte même du phallus[1] ? L’artifice de ces interprétations complaisantes empêcha qu’on les prît au sérieux, en dehors des petites chapelles de la secte.

IV

Dévouement sans limites à l’État, goût des « honneurs », respect du culte établi, quelle qu’en fût la vérité intrinsèque, amour du confort, orgueil de la vie, il n’est aucune de ces valeurs constitutives de la civilisation antique que ne compromît l’esprit chrétien ; et peu de griefs reviennent aussi souvent sous la plume de ses détracteurs que celui de ruiner les traditions ancestrales.

Mais à la racine des malentendus entre christianisme et paganisme, on aperçoit quelque chose de plus grave qu’une simple révolution dans les mœurs : des divergences pro-

  1. I, x. Trad. P. Quillard, p. 27.