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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/15

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Providence[1]. En fait, ils ne reconnaissaient son action qu’à l’ordre général de l’univers, — ordre établi une fois pour toutes, qui ne subit pas de retouches, et qui exclut les interventions spéciales, les volontés particulières, les crises imprévisibles. Que devenaient, dans un tel système, l’Incarnation, la Rédemption ?

Ces difficultés ne furent pas irréductibles pour tous les gens cultivés, puisqu’un bon nombre parmi eux se convertirent. Mais il est certain que le postulat de l’immutabilité du Cosmos et celui de l’impassibilité divine dominèrent maintes intelligences au point de les rendre absolument réfractaires aux postulats opposés de la Révélation chrétienne, qui les déconcertaient et les contredisaient trop.

V

On voit l’importance morale, philosophique, religieuse des débats dont l’histoire va être ici racontée. Ils se sont déroulés durant une période à laquelle on attache volontiers l’étiquette sommaire de « décadence ». Il est exact que la rhétorique et la sophistique, piètres disciplines, régnaient alors dans les écoles et dominaient les esprits. On en retrouve la trace dans ces controverses. Celles-ci pourtant excitaient si véhémentement, de part et d’autre, le zèle passionné, l’ardeur partisane, qu’elles échappèrent en une large mesure au verbalisme littéraire de ces temps ; et elles représentent, si je ne m’abuse, le plus original effort de la culture antique à son déclin.


  1. Origène remarque que Celse le fait à plusieurs reprises : Contra Celsum, v, 3 : cf. i, 57 ; iv, 4 ; iv, 99 (passage essentiel) ; vii, 68.