Aller au contenu

Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le pénible spectacle des dissentiments de ses fils, dont l’un, Geta, fut massacré presque dans ses bras.

Se doutant des défiances de Caracalla, elle se tourna dès lors vers la littérature et la philosophie, pour lesquelles elle s’était toujours senti beaucoup de goût. Philostrate l’appelle « Julia la philosophe » (ἡ φιλόσοφος Ἰουλία). Sa sœur Julia Moesa, qui vivait auprès d’elle, était elle-même une femme remarquable : c’est à ses initiatives hardies qu’Elagabal, en 218, devra le trône. Autour de ces deux princesses se groupait une élite de lettrés, d’astrologues et de beaux-esprits[1], où brillait Philostrate, épistolier réputé, ancien « sophiste » d’Athènes, futur auteur des Vies des Sophistes et des descriptions de Tableaux.

Au début même de sa Vie d’Apollonius, Philostrate raconte qu’un certain Damis, Assyrien d’origine et disciple d’Apollonius, avait rédigé sur celui-ci des Mémoires où il décrivait ses voyages et avait consigné ses paroles et ses prédictions. L’ouvrage serait resté sans doute inconnu, si un parent de Damis ne l’avait remis à Julia Domna. Julia « qui aimait et protégeait tout ce qui tenait aux lettres » commanda à Philostrate de refaire ce récit, suffisamment clair en sa contexture, mais mal écrit, et de le parer de son beau style[2]. Philostrate affirme qu’il a suivi la relation de Damis, sauf pour les derniers chapitres[3]. Il se serait aidé aussi de divers opuscules, des Lettres d’Apollonius, de son Testament, des souvenirs laissés par lui dans les villes où il avait séjourné.

Faut-il prendre au sérieux cette énumération diligente

  1. Dion Cassius, lxxv, 15 ; lxxvii, 18 ; Philostrate, Vie des Soph., II, 30, 1.
  2. L’ouvrage ne parut qu’après la mort de Julia, c’est-à-dire après 217, car, inspiré par elle, il ne lui est pas dédié.
  3. Exactement, jusqu’au livre VIII, 28.