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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/182

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poésie fraîche et pure : mais une suite d’anecdotes fabuleuses, dignes parfois des Mille et Une Nuits, des discours prolixes, des préceptes pédants. Apollonius ratiocine infatigablement sur les choses humaines et sur les choses divines. Incapable de rester coi, il a toujours à portée de la main le raisonnement spécieux, le mot décisif, la réplique pertinente, qui réduit au plus humiliant silence ceux qui essaient de le déconcerter, si haut placés qu’ils soient. Rien ne lui est étranger, ni la morale, ni la politique, ni l’art, ni la musique même. Tous subissent sa mystérieuse supériorité.

N’oublions pas non plus que les récits de vies héroïques, les collections de mirabilia, se ressemblent forcément par quelque côté, surtout dans l’Antiquité où la lex operis était prépondérante ; et que, de ce chef, certains rapprochements restent douteux, et peut-être fortuits[1].

Ces réserves faites, voici quelques traits qui ressemblent fort à des réminiscences.

À douze ans, Jésus enfant étonne les Maîtres dans le Temple par la surprenante sagesse de ses questions et de ses réponses. À seize ans, Apollonius attire à Égée, sinon par ses propos, du moins par l’ascétisme tout pythagoricien dont il donne le modèle, des visiteurs venus des villes de Cilicie et même des provinces voisines, à tel point qu’un dicton circule en Cilicie : « Où courez-vous si vite ? Allez-vous donc voir le jeune homme[2] ? » — Jésus est plus d’une fois mal compris ou mal suivi par ses disciples. Apollonius se voit délaissé par une partie des siens, quand il entreprend son voyage vers les Indes (I, 18), puis à Rome (IV, 37).

  1. Voir sur ce point Karl Holl, die schriftstellerische Form des griechischen Heiligenlebens, dans les Gesamm. Aufsätze zur Kirchengeschichte, t. II (Tübingen, 1925), p. 263.
  2. Vie d’Apoll., I, 8.