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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/205

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défaillance » ; 2o ἐσκοτίσθη ὁ ἥλιος, « le soleil s’obscurcit ». — Les éditeurs modernes, sauf exception[1], adoptent la première leçon.

II

Ces deux formes du texte furent connues de très bonne heure, et la leçon τοῦ ἡλίου ἐκλιπόντος éveilla dès le second siècle l’attention des adversaires du christianisme. En effet, ἐκλείπειν, dans la langue grecque classique se rencontre assez souvent pour désigner une « éclipse[2] ».

Un rédacteur aussi cultivé que le fut saint Luc, médecin de profession[3], avait-il réellement songé à une éclipse, au sens propre du mot, ou à un simple évanouissement de la lumière solaire, sans spécification de la cause ? Il devait savoir qu’un tel phénomène était impossible à l’époque où les Juifs célébraient la Pâque, et qui était justement celle de la pleine lune.

Quoi qu’il en soit, les polémistes païens crurent pouvoir prendre en défaut, sur ce point précis, le rédacteur du IIIe Évangile.

De récents historiens soupçonnent que, dès l’époque de Tibère, la question aurait été déjà discutée « dans un cercle qui touchait de près à la maison impériale[4] ». Cette conjecture s’appuie sur la mention d’un certain Thallus, dont Jules l’Africain allègue l’opinion[5], et en qui on voudrait

  1. Par ex. Blass, dans son édition de l’Évangile de saint Luc, Leipzig, 1897, p. 107-108.
  2. Thucydide, ii, 28 ; vii, 50, 4 ; Xénophon, Hell., I, 6, 1 ; Diodore I, 3, 12, etc.
  3. Cf. Harnack, Beitr. zur Einl. in das neue Test. ILukas der Artz, Leipzig, 1906, p. 122 et suiv.
  4. M. Goguel, Vie de Jésus, Paris, 1932, p. 70 et s.
  5. Le passage est traduit plus loin, p. 209.