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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/289

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Renan[1] » ; et je comprends mal que J. Bidez paraisse la faire sienne[2].

S’il ne s’agissait que de comparer Celse et Porphyre, la chose serait aisée. Dans le détail ils se rencontrent souvent[3] ; seulement Celse avait des vues politiques, une vive préoccupation des destinées de l’Empire. Porphyre demeure, sinon étranger, du moins assez indifférent à ce souci. Il ne s’intéresse guère à la tradition des aïeux que sous son aspect religieux[4], et les tristes leçons de son siècle, la crise lamentable de 235 à 268, l’ont refroidi à l’égard de l’État, qu’il laisse se tirer d’affaire par ses propres moyens. — D’autre part, de Celse à Porphyre, le progrès critique est manifeste : ce n’est plus seulement la question de la divinité du Christ et de sa venue en ce bas monde qui est discutée, c’est toute la Bible qui est contrôlée, passée au crible, ponctuellement analysée.

Mais le point litigieux est de savoir à quelle famille d’esprits Porphyre se rattache. Le rapport me paraît bien plus sensible de Porphyre à Voltaire que de Porphyre à Renan. Edgar Quinet avait signalé cette filiation, dès 1838, dans un éloquent et perspicace article de la Revue des Deux Mondes[5]. Selon le système porphyrien, remarquait-il — et selon le système païen en général — « la partie miraculeuse des Écritures ne révèle que la fraude des uns et

  1. La persécution de Dioclétien, 2e éd., t. I, p. 78.
  2. Vie de Porphyre, p. 77.
  3. Certains de ces parallèles ont été déjà signalés. Voy. encore Origène, Contre Celse, V, 4, et fragm. no 76 ; II, 24 ; 63, et fragm. no 62 ; II, 1, et fragm. no 709 ; V, 14, et fragm. nos 35 et 94.
  4. Voy. la Lettre à Marcella, § 17, « le plus grand fruit de la piété, c’est d’honorer le divin κατὰ τὰ πάτρια ». Notez aussi dans le fragm. no 1 les expressions οἱ τῶν πατρίων ἐθῶν ἀποστάντες (ligne 7) ; οἱ τῶν πατρίων φυγάδες (ligne 15) ; τὸ μεταθέσθαι… τῶν οἰκείων (ligne 17).
  5. 1er décembre 1838, p. 589.