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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/295

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rougi des extravagances du paganisme et croit qu’il s’est amélioré en une certaine mesure au contact des chrétiens[1]. Il a même la naïveté de supposer que si Platon et Porphyre avaient combiné ensemble deux opinions qu’ils professèrent séparément sur la destinée des âmes, facti essent fortasse christiani, « ils seraient peut-être devenus chrétiens[2] » ! Au fond, Augustin n’a jamais pu oublier ce qu’avait été pour lui la philosophie néo-platonicienne dans une période où, déjà séduit par le catholicisme, il se cherchait encore, l’avidité heureuse avec laquelle il s’était ouvert à son influence, l’ardeur enthousiaste qu’elle lui avait inspirée. C’est plus tard seulement qu’il se rendit compte de ce que cette prévention à l’égard du néo-platonisme pouvait avoir d’imprudent : il accentua alors ses réserves et marqua ses points de désaccord[3].

À l’époque où Porphyre composait le Κατὰ χριστιανῶν, la bataille entre le christianisme et le paganisme pouvait paraître encore d’issue incertaine. Et Porphyre était fondé à penser que les armes qu’il apportait à ses coreligionnaires les aideraient puissamment. Mais moins de quarante ans après éclatait le coup de théâtre qui allait changer du tout au tout la situation qu’il avait connue. L’Église se réconciliait avec l’État romain, elle entrait dans une ère de prospérité matérielle, et sa puissance spirituelle, étayée de l’appui des pouvoirs publics, s’épanouissait presque sans obstacle. Le « testament de l’hellénisme », comme Har-

  1. Ibid., XXII, 27.
  2. Sermo, 241, § 6 et 7 (Patrol. lat., 38, 1137).
  3. Cette évolution, déjà sensible dans les Confessions, s’achève dans les Rétractations : voy. surtout I, 1, 12 : « Laus ipsa, qua Platonem vel Platonicos seu Academicos philosophos tantum extuli quantum impios homines non oportuit, non immerito mihi displicuit. »