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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/417

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Il s’en prenait aussi à saint Jean, le seul des disciples qui ait osé insinuer, en termes assez enveloppés, que Jésus créa le ciel et la terre[1] ; le seul qui ait osé proclamer la divinité du Christ.

Ni Paul, ni Matthieu, ni Luc, ni Marc ne se sont hasardés à l’appeler Dieu. Mais l’excellent Jean, s’apercevant que déjà, dans beaucoup de villes de Grèce et d’Italie, quantité de personnes s’étaient laissé prendre par cette maladie, et apprenant, j’imagine, que les tombes de Pierre et de Paul étaient honorées (secrètement, mais il dut le savoir tout de même), osa, le premier, lui donner ce nom. Après avoir brièvement parlé de Jean-Baptiste, Jean revient au Verbe dont il se fait le héraut. « Et le Verbe devint chair, et il habita parmi nous. » Comment ? Il ne le dit pas, parce qu’il a honte. Toutefois, nulle part il ne l’appelle Jésus ou Christ, aussi longtemps qu’il l’appelle Dieu et Verbe. C’est insensiblement et à petit bruit qu’il cherche à surprendre nos oreilles ; et il déclare que Jean-Baptiste porta ce témoignage sur le Christ-Jésus, que c’était celui-là dont il fallait croire qu’il est Dieu le Verbe. Que Jean affirme cela de Jésus-Christ, je n’y contredis pas moi-même. Cependant, il y en a parmi les « impies » qui pensent qu’autre est Jésus-Christ, autre le Verbe célébré par Jean. Mais il n’en est pas ainsi. Car celui qu’il dit être le Dieu Verbe, c’est celui-là qui, ajoute-t-il, fut reconnu par Jean-Baptiste comme étant le Christ Jésus. Mais remarquez de quelle façon précautionneuse, doucereuse et dissimulée il introduit dans son drame le suprême parachèvement de son impiété : il est assez artificieux et fourbe pour exécuter une dérobade : « Personne n’a jamais vu Dieu, ajoute-t-il, c’est le Fils unique, celui qui est dans le sein du Père, qui l’a fait connaître. » Mais alors, est-ce que le Dieu Verbe, celui qui s’est fait chair, c’est ce Fils unique, qui est dans le sein du Père ? Si c’est lui, comme je le crois, vous avez donc vu Dieu, vous aussi !… Vous l’avez vu, sinon Dieu le Père, du moins le Dieu Verbe[2]

On relève enfin chez Julien quelques attaques contre saint Pierre. Il raillait, par exemple, la vision, « l’apoca-

  1. P. 201, 17.
  2. P. 223, 4 et s.