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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/480

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Ailleurs[1] il montre comment, pour payer la rançon exigée de Rome par Alaric, il fallut mettre la main sur les ornements des temples et faire fondre les statues (parmi lesquelles la statue de la Vertu). Sacrifice bien douloureux, que Zosime déplore, car « ces images étaient celles dont le culte avait rendu Rome florissante pendant tant de siècles » ; et « cela fit juger à ceux qui étaient instruits dans les mystères de l’ancienne religion que ce qui restait de vertu et de force parmi les Romains serait bientôt tout à fait anéanti ».

Voici de quel ton il raconte les lendemains de la victoire de Théodose sur Eugène, dernier espoir du parti païen[2] :

Ayant assemblé le Sénat, qui demeurait fermement attaché aux lointaines traditions des aïeux et qui jamais ne s’était joint à ceux qui inclinaient à mépriser les dieux[3], l’empereur fit un discours pour exhorter les membres à renoncer à leur « vieille erreur », comme il l’appelait, et à embrasser la foi chrétienne, laquelle promet aux hommes de laver leurs fautes et de les délivrer de leurs impiétés[4].

Personne ne se rendit à ses suggestions et nul ne consentit à rejeter des rites demeurés traditionnels depuis la fondation de la Ville. « À les observer, remarquèrent-ils, Rome était restée florissante pendant douze cents ans. Pourquoi en prendre d’autres, dont on ne savait quel serait le fruit ? »

Théodose répondit alors que les frais des sacrifices étaient à la charge de l’État ; qu’il ne voulait plus faire une dépense dont il n’approuvait pas l’objet ; qu’au surplus les fonds qu’elle nécessitait lui étaient indispensables pour subvenir aux besoins de l’armée.

Le Sénat riposta que les sacrifices ne pouvaient se parachever dans les conditions requises, si l’État n’en assumait les frais.

Malgré ces remontrances, ils furent abolis, toutes les traditions ancestrales furent abandonnées, — et c’est ce qui amena la décadence gra-

  1. Ibid., V, xli.
  2. IV, 59 (Corp. Byz., t. 30, p. 245).
  3. Zosime exagère quelque peu. Voy. ici p. 341.
  4. Cf. II, 29.