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Page:Lafargue - Pamphlets socialistes, 1900.djvu/169

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Marie pleurait, Joseph riait, il sentait ses cornes grandir.

Le Saint-Père et le Saint-Esprit, arrivés à la porte du paradis, demandèrent le cordon.

—Où vas-tu Saint-Esprit ? questionna Saint-Pierre.

—Sur la terre.

—T’es brave. La chasse est ouverte, et il se pourrait qu’on te logeât une charge de plomb dans le derrière.

—Saperlipopette ! saperlip… C’est vrai et sérieux.

—Pape infaillible, continua-t-il de sa voix la plus grave, j’ai de grands devoirs à remplir ; je ne peux exposer ma vie ainsi qu’un simple pigeon. Ces mécréants d’hommes n’adorent que leur estomac ; ils seraient capables de me canarder, plumer et sauter à la crapaudine. Et que deviendrait la Trinité si moi, son intelligence, j’étais passé au beurre. Et la vierge Marie, la malheureuse ! Vieillard, de saints devoirs publics et privés m’attachent au rivage du Paradis. Quel malheur ! j’aimerais tant à me sacrifier pour implanter parmi les hommes l’autonomie communale et la République parlementaire et malthusienne. Adieu !

Et le pigeon s’envola à tire d’ailes.

—Mais qui diable es-tu ? demanda le portier.

—Je suis ton successeur, Pierre, ne feras-tu rien pour moi ?

—T’es le voleur Pie IX ? T’es celui qui a exploité mon nom pour te faire des rentes ; tu empoches le denier de saint Pierre et ne me donnes pas un rouge liard. Va-t’en, d’ici, canaille !