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Page:Lafenestre - Molière, 1909.djvu/125

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passions et caractères.

de Lélie, avec toutes ses imprudences et pétulances, par hâte de posséder sa belle esclave, manque, à tout coup, de la perdre, jusqu’au Malade imaginaire, où ce maniaque et sot d’Argan, par égoïsme et pusillanimité, se laisse capter son héritage par la vilaine Béline, quelle variété, aimable ou ridicule, d’amoureux et d’amoureuses, de fanfarons, de dupes et hypocrites d’amour, de tout âge, de tout rang, de toute humeur, de toute profession, dont la suite se déroule en ses comédies bouffonnes ou tragiques !

L’autre passion qui, chez lui, domine, avec ou après l’amour, est celle du théâtre. Il en aime le métier comme il en aime l’art. Il se plaît sur les planches, d’abord en comédien, parce que son ardeur de vivre éprouve une ivresse joyeuse à se travestir, se transformer, s’incarner, en des êtres divers et nouveaux. Il s’y plaît comme auteur, observateur, juge et justicier, parce que c’est de là qu’on peut parler le plus haut et le plus clair, communiquer à un plus nombreux public, par le rire ou l’émotion, ses propres sentiments et ses propres pensées, le charmer, le divertir, l’instruire, le moraliser. Dès ses débuts, il montre et il prouve qu’il comprend sa profession dans toute l’étendue de ses attraits, de ses devoirs, de ses influences. Et c’est dans cette passion pour le théâtre qu’il fortifie une autre passion plus haute encore, celle de la vérité humaine qu’il y veut transporter, la passion du naturel, de la franchise, de la simplicité, et, partant, la haine de tous les mensonges, hypocrisies, charlatanismes. Et c’est, à son tour, cette passion impérieuse pour la vérité, qui, en se portant, avec une même curiosité.