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« C’est assez de déchirer sa tunique légère, de briser les liens qui retiennent ses cheveux, de faire couler ses larmes.

« Heureux celui qui, dans sa colère, peut voir pleurer une jeune fille ; mais celui qui frappe n’est bon qu’à porter le bouclier et le pieu ; qu’il s’éloigne de la douce Vénus. »

Les jeux des filles de Sparte.

Les jeux des filles de Sparte qui avaient un but sérieux au temps de l’indépendance de cette République, n’étaient plus, après son asservissement, qu’un spectacle licencieux que Properce a décrit dans l’Elégie XIV du livre III.

« Heureuse Lacédémone, nous admirons les jeux où se forment les jeunes filles. Sans honte, elles paraissent nues au milieu des lutteurs. Tour à tour, on les voit, couvertes de poussière, attendre l’heure de la lice et recevoir les rudes coups du pancrace.

« Elles attachent le ceste à leurs bras, lancent le disque, ou bien elles font décrire un cercle à un coursier rapide, ceignent d’un glaive leurs flancs d’albâtre et couvrent d’un casque leur tête virginale.

« D’autres fois, les cheveux couverts de frimas, elles pressent sur les longs sommets du Taygète le chien de Laconie. »

La loi de Sparte défend le mystère aux amants et on peut se montrer partout en public aux côtés de la femme qu’on aime. On n’a point à redouter la vengeance d’un mari, on n’emploie pas d’intermédiaire pour déclarer ses feux, et si l’on est repoussé, on n’a point à subir de longs délais. Le regard errant à l’aventure n’est point trompé par la pourpre de Tyr, ou intercepté par un nombreux cortège d’esclaves.

La description que, dans son chapitre XLII, Lucien donne de la lutte amoureuse entre Lucius et Palestra lui a peut-être été suggérée par les jeux de Sparte :

« Nue et droite Palestra commande :

« Frotte-toi d’huile, embrasse ton adversaire, renverse-le d’un croc en jambe, tiens-le sous toi, glisse ; un écart, qu’on se fende, serre bien ; prépare ton arme en avant ; frappe, blesse, pénètre jusqu’à ce que tu sois las. De la force dans les reins ! allonge maintenant ton arme, pousse-là par en bas ; de la vigueur ; vise au mur, frappe ; dès’ que tu sens mollir, vite un dégagement et- une étreinte ; tiens ferme, pas tant de précipitation ; un temps d’arrêt ! Allons ! au but ! Te voilà quitte.

« Une pesé, maintenant, dit Palestra, la lutte à genoux ! et elle tombe sur ses genoux au milieu du lit. Te voilà au milieu, beau lutteur ! serre ton adversaire comme un nœud ; penche-le ensuite et fonds sur lui avec ton trait acéré, saisis-le de près et ne laisse aucun intervalle entre vous. S’il commence à lâcher prise, enlève-le sans perdre un instant, tiens-le en l’air, frappe-le en dessous et ne recule pas sans en avoir reçu l’ordre ; fais-le coucher, contiens-le, donne-lui de nouveau un croc-en-jambe afin qu’il ne t’échappe pas ; tiens-le bien et presse ton mouvement ; lâche-le, le voilà terrassé, il est tout en nage. »