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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 1.djvu/371

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POÉTIQUES.


Tu mourus cependant de la mort du vulgaire,
Ainsi qu’un moissonneur va chercher son salaire,
Et dort sur sa faucille avant d’être payé ;
Tu ceignis en mourant ton glaive sur ta cuisse,
Et tu fus demander récompense ou justice

Au Dieu qui t’avait envoyé !


On dit qu’aux derniers jours de sa longue agonie,
Devant l’éternité seul avec son génie,
Son regard vers le ciel parut se soulever :
Le signe rédempteur toucha son front farouche ;
Et même on entendit commencer sur sa bouche

Un nom… qu’il n’osait achever.


Achève… C’est le Dieu qui règne et qui couronne,
C’est le Dieu qui punit, c’est le Dieu qui pardonne :
Pour les héros et nous il a des poids divers.
Parle-lui sans effroi : lui seul peut te comprendre.
L’esclave et le tyran ont tous un compte à rendre ;

L’un du sceptre, l’autre des fers.


Son cercueil est fermé : Dieu l’a jugé. Silence !
Son crime et ses exploits pèsent dans la balance :
Que des faibles mortels la main n’y touche plus !
Qui peut sonder, Seigneur, ta clémence infinie ?
Et vous, peuples, sachez le vain prix du génie

Qui ne fonde pas des vertus !