Aller au contenu

Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 10.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux délibérations des ministres, leurs amis élevés à tous les emplois, servaient tout bas de texte aux objurgations des Jacobins exaltés. On appelait ces Jacobins Montagnards, par allusion aux bancs élevés de l’Assemblée où siégeaient les amis de Robespierre et de Danton. « Souvenez-vous, disaient-ils, de la sagacité de Robespierre, presque semblable au don de la prophétie, quand, répondant à Brissot, qui attaquait l’ancien ministre de Lessart, il lançait au chef girondin cette allusion si tôt justifiée : « Pour moi qui ne spécule le ministère ni pour moi ni pour mes amis… » De leur côté, les journaux girondins couvraient d’opprobre cette poignée de calomniateurs et de petits tyrans qui ressemblaient à Catilina par ses crimes, s’ils ne lui ressemblaient par son courage. Ainsi commençait la guerre, par l’injure.

Le roi cependant, une fois son ministère complété, écrivit à l’Assemblée une lettre plus semblable à une abdication entre les mains de l’opinion qu’à l’acte constitutionnel d’un pouvoir libre. Cette résignation humiliée était-elle un signe de servitude, d’abaissement et de contrainte fait du haut du trône aux puissances armées, pour qu’elles comprissent qu’il n’était plus libre, et ne vissent plus en lui que l’automate couronné des Jacobins ? Voici cette lettre :


« Profondément touché des désordres qui affligent la France et du devoir que m’impose la constitution de veiller au maintien de l’ordre et de la tranquillité publique, je n’ai cessé d’employer tous les moyens qu’elle met en mon pouvoir pour faire exécuter les lois. J’avais choisi pour mes premiers agents des hommes que l’honnêteté de leurs principes et de leurs opinions rendait recommandables. Ils ont quitté