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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/140

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faire trop attention à ce que racontent les habitants de ces villages, toujours en guerre avec les Bédouins. Il ne doit pas exister entre eux une très-grande harmonie ; notre position est bien différente : nous sommes commerçants ; nous allons vendre nos marchandises aux Bédouins, et non leur faire la guerre : en agissant honnêtement avec eux, je ne vois pas le moindre danger pour nous. » Ces paroles rassurèrent un peu Scheik-Ibrahim.

Quelques jours après notre arrivée, pour soutenir notre rôle de marchands, nous ouvrîmes nos ballots sur la place, au milieu du village, devant la porte du scheik. Je vendis aux femmes quelques objets, qui furent payés en argent. Les gens désœuvrés se rassemblaient autour de nous pour causer ; un d’eux, fort jeune, nommé Hessaisoun-el-Kratib, m’aidait à recevoir l’argent, et à faire les comptes avec les femmes et les enfants ; il montrait un grand zèle pour mes intérêts. Un jour, me trouvant seul, il me demanda si j’étais capable de garder un secret. « Prenez-y garde, ajouta-t-il ; c’est un grand secret qu’il ne faut confier à personne, pas même à votre compagnon. » Lui en ayant donné ma parole, il me dit qu’à une heure du village il y avait une grotte dans laquelle se trouvait une grande jarre remplie de sequins ; il m’en donna un, m’assurant qu’il ne pouvait pas se servir de cette monnaie, qui n’avait cours qu’à Palmyre. « Mais vous, continua-t-il, qui allez de ville en ville, vous la changerez aisément ; vous avez mille moyens que je n’ai pas de profiter de ce trésor. Cependant je ne veux pas vous donner le tout ; mais je laisse le partage à votre générosité. Vous viendrez avec moi reconnaître les lieux. Nous transporterons cet or peu à peu en secret, et vous