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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/391

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jusqu’à présent je n’ai pas eu l’occasion de la mettre à l’épreuve. — Mon seigneur, répondit l’esclave, dites-moi en quoi je pourrais vous être utile. — Je désire, dit Hadifah, que tu ailles te poster au grand défilé. Demeure en cet endroit, et va t’y cacher demain dès le matin. Observe bien les chevaux, et vois si Dahis est devant. Dans ce dernier cas, présente-toi subitement à lui, frappe-le à la tête, et fais en sorte qu’il s’arrête, afin que Ghabra passe devant, et que nous n’encourions pas la disgrâce d’être vaincus. Car, je l’avoue, dès que j’ai vu Dahis, sa conformation m’a fait naître des doutes sur l’excellence de Ghabra, et j’ai peur que ma jument ne soit vaincue, et que nous ne devenions un sujet de dérision parmi les Arabes. — Mais, seigneur, comment distinguerai-je Dahis de Ghabra, quand ils s’avanceront tous deux environnés d’un nuage de poussière ? » Hadifah répondit : « Je vais te donner un signe, et t’expliquer l’affaire de manière à ne te laisser aucune difficulté. » En disant ces mots, il ramassa quelques pierres à terre, et ajouta : « Prends ces pierres avec toi. Quand tu verras le soleil se lever, tu te mettras à les compter, et tu les jetteras à terre quatre à quatre. Tu répéteras cette opération cinq fois ; c’est à la dernière que doit arriver Ghabra. Tel est le calcul que j’ai fait. Que s’il se présentait à toi un nuage de poussière et qu’il te restât encore quelques pierres dans la main, par exemple, un tiers ou la moitié, ce serait la preuve que Dahis aurait gagné les devants et qu’il serait devant tes yeux. Alors jette-lui une pierre à la tête comme je t’ai dit, arrête-le dans sa course, afin que ma jument puisse le dépasser[1]. » L’esclave consentit à tout. S’étant

  1. Il y a des variantes dans les manuscrits d’Antar, à ce passage où