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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/304

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La lettre qui contenait ces engagements était signée du ministre de la guerre et de Louis XVI lui-même.

M. de Custine partit pour Brunswick au mois de janvier. À son arrivée il fit remettre sa lettre au duc. Quatre jours s’écoulèrent avant qu’un entretien lui fût accordé. Le cinquième jour, le duc l’admit à une audience particulière. Il exprima à M. de Custine, avec une franchise militaire, l’orgueil et la reconnaissance que le prix attaché à son mérite par la France était fait pour lui inspirer. « Mais, ajouta-t-il, mon sang est à l’Allemagne et ma foi est à la Prusse. Mon ambition est satisfaite d’être la seconde personne de cette monarchie qui m’a adopté. Je ne changerai pas, pour une gloire aventureuse sur le théâtre mouvant des révolutions, la haute et solide position que ma naissance, mon devoir et quelque gloire acquise me font dans mon pays. » À la fin de cette conversation, M. de Custine, trouvant le prince inébranlable, découvrit son ultimatum et fit briller à ses yeux l’éventualité de la couronne de France, si elle venait à tomber du front de Louis XVI, ramassée par les mains d’un général victorieux. Le duc parut ébloui, et congédia M. de Custine sans lui ôter tout espoir d’accéder à un pareil prix. Le négociateur partit triomphant. Cependant quelque temps après, le duc, soit duplicité, soit repentir, soit prudence, répondit par un refus formel à l’une et à l’autre de ces propositions. Il adressa sa réponse à Louis XVI et non au ministre, et cet infortuné roi connut ainsi le dernier mot du parti constitutionnel, et combien tenait peu sur sa tête une couronne qu’on offrait déjà en perspective à l’ambition d’un ennemi.