Aller au contenu

Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/466

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cette époque dans cet état intermédiaire entre deux dominations si favorables à l’anarchie. Les partisans du gouvernement papal et les partisans de la réunion à la France y luttaient dans une alternative d’espérance et de crainte qui prolongeait et envenimait leur haine. Le roi, par un scrupule religieux, avait trop longtemps suspendu l’exécution du décret de réunion. Tremblant d’usurper sur le domaine de l’Église, il se décidait tard, et ses délais impolitiques donnaient du temps aux crimes.

La France était représentée dans Avignon par des médiateurs. L’autorité provisoire de ces médiateurs était appuyée par un détachement de troupes de ligne. Le pouvoir, tout municipal, reposait dans la dictature de la municipalité. La population, agitée et passionnée, se divisait en parti français ou révolutionnaire, et en parti opposé à la réunion à la France et à la Révolution. Le fanatisme de la religion chez les uns, le fanatisme de la liberté chez les autres, poussaient les deux partis aux mêmes crimes. L’ardeur du sang, la soif de vengeances privées, le feu du climat, s’ajoutaient aux passions civiles. Les violences des républiques italiennes devaient se retrouver dans les mœurs de cette colonie de l’Italie et de cette succursale de Rome sur les bords du Rhône. Plus les États sont petits, plus les guerres civiles y sont atroces. Les opinions opposées y deviennent des haines personnelles ; les batailles n’y sont que des assassinats. Avignon préludait à ces assassinats en masse par des meurtres particuliers.

Le 16 octobre, une agitation sourde se trahit par des attroupements populaires, composés surtout d’hommes du peuple ennemis de la Révolution. Les murs des églises furent couverts d’affiches appelant la population à la révolte