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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/484

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aux assemblées de l’hôtel de ville ! Oui, sans doute ; c’est qu’elle est convaincue que le patriotisme est une seconde religion, qu’aucune hypocrisie n’approche de mon âme, et que ma vie est véritablement tout entière à Dieu, à la patrie, à l’amitié !… — Et vous osez vous prétendre chaste ! lui répondaient, par l’organe de l’abbé de Valmeron, les prêtres fidèles et indignés. Quelle dérision ! Chaste au moment où vous avouez les penchants les plus déréglés, où vous arrachez une femme au lit de son époux, à ses devoirs de mère, quand vous traînez cette insensée enchaînée à vos pas pour la montrer avec ostentation ! Quel est votre cortége, monsieur ? Une troupe de bandits et de femmes perdues. Digne pasteur de cette vile populace, elle célèbre votre visite pastorale par les seules fêtes capables de vous réjouir ; votre passage est marqué par tous les excès du brigandage et de la débauche. » Ces objurgations sanglantes retentirent dans les départements et enflammèrent les esprits. Les prêtres assermentés et les prêtres non assermentés se disputaient les autels. Une lettre du ministère de l’intérieur venait d’autoriser les prêtres non assermentés à célébrer le saint sacrifice dans les églises qu’ils avaient autrefois desservies. Obéissant à la loi, les prêtres constitutionnels leur ouvraient les chapelles et leur fournissaient les ornements nécessaires au culte ; mais la foule, fidèle aux anciens pasteurs, injuriait et menaçait les nouveaux. Des rixes sanglantes avaient lieu entre les deux cultes sur le seuil de la maison de Dieu. Le vendredi 4 novembre, l’ancien curé de la paroisse de Saint-Jean, à Caen, se présenta pour y dire la messe. L’église était pleine de catholiques. Ce concours irrita les constitutionnels ; il exalta les autres. Le Te Deum en actions de grâce fut demandé et chanté