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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/52

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les textes de ses discussions. De toutes les passions du peuple, celle qu’on y flattait le plus, c’était la haine ; on le rendait ombrageux pour l’asservir. Convaincu que tout conspirait contre lui, roi, reine, cour, ministres, autorité, puissances étrangères, il se jetait avec désespoir dans les bras de ses défenseurs. Le plus éloquent à ses yeux était celui qui le pénétrait de plus de crainte ; il avait soif de dénonciations, on les lui prodiguait. C’est ainsi que Barnave, les Lameth, puis Danton, Marat, Brissot, Camille Desmoulins, Pétion, Robespierre, avaient conquis leur autorité sur le peuple. Ces noms avaient monté avec sa colère ; ils l’entretenaient, cette colère, pour rester grands. Les séances nocturnes des Jacobins et des Cordeliers étouffaient souvent l’écho des séances de l’Assemblée nationale ; la minorité, vaincue au Manége, venait protester, accuser et menacer aux Jacobins.

Mirabeau lui-même, accusé par Lameth à propos de la loi sur l’émigration, était venu, peu de jours avant sa mort, écouter en face les invectives de son dénonciateur ; il n’avait pas dédaigné de se justifier. Les clubs étaient la force extérieure où les meneurs de l’Assemblée appuyaient leurs noms pour intimider la représentation nationale. La représentation nationale n’avait que les lois ; le club avait le peuple, la sédition et même l’armée.