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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/55

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sives ; l’offensive seule groupe les factions : elles s’éteignirent d’elles-mêmes jusqu’à la fondation du club des Feuillants. Le peuple dissipa à coups de pierres les premiers rassemblements de députés chez M. de Clermont-Tonnerre. Barnave injuria à la tribune ses collègues, et les voua à l’exécration publique, de la même voix qui avait suscité et rallié les Amis de la Constitution. La liberté n’était encore qu’une arme partiale qu’on brisait, sans pudeur, dans les mains de ses ennemis.

Que restait-il au roi, pressé ainsi entre une assemblée qui avait usurpé toutes les fonctions exécutives, et ces réunions factieuses qui usurpaient tous les droits de représentation ? Placé sans forces propres entre ces deux puissances rivales, il n’était là que pour recevoir le contre-coup de leur lutte, et pour être jeté, tous les jours, en sacrifice par l’Assemblée nationale à la popularité ; une seule force maintenait encore l’ombre du trône et l’ordre extérieur debout : c’était la garde nationale de Paris. Mais la garde nationale était une force neutre, qui ne recevait de loi que de l’opinion, et qui, flottant elle-même entre les factions et la monarchie, pouvait bien maintenir la sécurité dans la place publique, mais ne pouvait servir d’appui ferme et indépendant à un pouvoir politique. Elle était peuple elle-même ; toute intervention sérieuse contre la volonté du peuple lui eût paru un sacrilége. C’était un corps de police municipale, ce ne pouvait être encore l’armée du trône ou de la constitution. Elle était née d’elle-même, le lendemain du 14 juillet, sur les marches de l’hôtel de ville ; elle ne recevait d’ordre que de la municipalité. La municipalité lui avait donné pour chef le marquis de La Fayette : elle ne pouvait pas mieux choisir ; le peuple honnête, dirigé