Aller au contenu

Page:Lambert - Le Mandarin.pdf/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

195
LE MANDARIN.

« Je détruis sans pitié tout ce qui s’oppose à mon envahissement.

« Je jette à la face des rochers, pendant les siècles des siècles, mes flots qui s’imprègnent en eux, les rongent et les minent.

« Ces rochers que la nature avait mis debout, et dont l’élévation contenait pour moi un perpétuel défi, je les roule au fond de mes abîmes.

« Les constructions des hommes sont des hochets que j’agite à mon gré et que je brise en me jouant.

« Nul ne peut me dompter, je suis l’image de l’orgueil ! »


À son tour la mer se tut et le vent chanta.


Écoutez ce que chante le veut ; sa voix domine le chant des oiseaux et ressemble à la voix des animaux féroces :

« Je suis le vent destructeur qui souffle sur la mer.

« Je me cache dans les voiles et je sais aider le navire à glisser sur les vagues inégales.

« Je disperse les feuilles jaunies et je balaie avec violence les nuages sombres pendant l’hiver.

« Je berce les rêveries ! Dans les longues soirées j’accompagne la voix du conteur.

« Je forme sur terre et sur mer la trombe qui renverse rochers, vaisseaux, moissons, arbres, palais !