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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/230

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traités où l’on se propose d’expliquer ce qu’Aristote a voulu dire avec ses catégories ou énonciations ou espèces d’énonciations. Le but essentiel aurait été atteint plus vite, si l’on s’était décidé d’abord à regarder comme prématuré et obscur ce qui l’est en effet chez Aristote, au lieu de chercher derrière chaque expression inintelligible un secret de la plus haute sagesse. Nous pouvons admettre comme constant qu’Aristote, par son système des catégories, a voulu déterminer de combien de manières principales on peut affirmer ce qu’est une chose quelconque ; et que, sous l’influence du langage, il se laissa entraîner à identifier les formes de l’affirmation et les modes de l’être (25).

Sans examiner ici jusqu’à quel point on aurait raison, avec la logique d’Ueberweg ou avec Schleiermacher et Trendelenlourg, de mettre en parallèle les formes de l’être et celles de la pensée et de les faire concorder ensemble avec plus ou moins d’exactitude, bornons-nous à dire (bientôt nous nous expliquerons plus amplement) que la confusion des éléments subjectifs et objectifs dans notre conception des choses est un des traits caractéristiques du système d’Aristote ; et que cette confusion, surtout sous ses formes les plus grossières, est devenue la base de la scolastique.

Aristote n’a pas introduit cette conclusion dans la philosophie ; il a au contraire commencé à distinguer ce que la conscience non-scientifique est toujours portée à identifier. Mais Aristote n’a laissé qu’une ébauche informe de cette distinction. Or c’est précisément ce qu’il y avait d’incorrect et de prématuré dans sa logique et dans sa métaphysique, qui est devenu, pour les grossières nations de l’Occident, la pierre angulaire de la science philosophique, parce que c’était ce qui plaisait le mieux à leur intelligence encore inculte. Nous en trouvons un exemple intéressant dans Frédégise, élève d’Alcuin, qui fit hommage à Charlemagne d’une épitre théologique De nihilo et tenebris. L’auteur y définit comme un être existant le néant, hors duquel Dieu tira le