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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/293

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ressortir Lichtenberg : « Il pense, devrait-on dire, comme on dit : il tonne. Dire cogito est déjà trop, quand on le traduit par je pense. Accepter, exiger le je, est un besoin pratique (9).

Dans l’année 1646, Gassendi fut nommé professeur royal de mathématiques à Paris, où son nombreux auditoire se composait d’hommes de tout âge, entre autres de savants distingués. Il s’était déterminé à contre-cœur à quitter sa résidence méridionale et, comme il ne tarda pas à être atteint d’une affection de poitrine, il retourna à Digne, où il resta jusqu’en 1653. C’est de cette période de sa vie que datent la plupart de ses écrits sur Épicure, ainsi que l’exposé de ses propres doctrines. Il rédigea, dans le même temps, outre plusieurs ouvrages astronomiques, une série de biographies substantielles, parmi lesquelles on remarque surtout celles de Copernic et de Tycho-Brahé. De tous les représentants éminents du matérialisme, Gassendi est le seul qui soit doué du sens historique et il l’est d’une manière remarquable. Dans son Syntagma philosophicum aussi, il commence par traiter chaque question historiquement sous toutes ses faces.

En ce qui concerne l’univers, il déclare que les principaux systèmes sont ceux de Ptolémée, de Copernic et de Tycho-Brahé. Il rejette complètement celui de Ptolémée ; celui de Copernic, ajoute-t-il, est le plus simple et le plus conforme à la réalité, mais il faut adopter celui de Tycho-Brahé, parce que la Bible admet positivement le mouvement du soleil. Remarquons, comme trait caractéristique de ce temps-là, que Gassendi, ordinairement si prudent, après avoir, sous tous les autres rapports, complété son système matérialiste, sans se brouiller avec l’Église, ne put pas même repousser le système de Copernic, sans encourir le soupçon d’hérésie en fait de conception de l’univers, à cause des éloges qu’il avait accordés à ce savant. On comprend toutefois jusqu’à un certain point la haine des partisans de