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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/339

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théorie, que l’on désigne aujourd’hui sous le nom d’hypothèse Kant-Laplace. Dans la préface de cet ouvrage, Kant reconnaît que sa théorie ressemble beaucoup à celles d’Épicure, Leucippe et Démocrite (70). Personne ne pensait plus à voir dans l’attraction universelle entre éléments matériels autre chose qu’un principe mécanique, et aujourd’hui les matérialistes se plaisent à assigner au système du monde newtonien le rôle que, jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, on avait accordé à l’ancienne atomistique. C’est la théorie qui fait naître toutes choses de la nécessite en vertu d’une propriété commune à toute matière.

L’influence des idées religieuses de Newton et de Boyle se sépara aisément et rapidement de celle de leurs découvertes scientifiques, dans l’action que leurs travaux exercèrent sur le progrès de la culture générale. La première influence paraît toutefois s’être fait sentir dans l’Angleterre elle-même, dès les premiers temps, on rencontre comme produit indigène un singulier mélange de foi et de matérialisme. Cependant le caractère conservateur de Boyle et de Newton peut jusqu’à un certain point avoir été le résultat du temps et des circonstances dans lesquelles ils vécurent. D’après l’intéressante remarque de Buckle, l’époque révolutionnaire et notamment les violents orages politiques et sociaux de la première révolution anglaise eurent une influence considérable et profonde sur l’esprit des écrivains, surtout en ébranlant le respect pour l’autorité et en éveillant l’esprit de scepticisme (71). Le scepticisme de Boyle en chimie apparaît aussi à Buckle comme un fruit de ce temps-là, d’autant plus que, sous Charles II, le mouvement révolutionnaire continua sans interruption sur un terrain du moins, celui des recherches expérimentales qu’on poursuivait avec une ardeur croissante. D’un autre côté, on doit remarquer que les plus importantes découvertes de Boyle et de Newton furent faites précisément dans la période de tranquillité relative et de réaction, comprise entre les deux