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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/121

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livre de lecture destiné aux enfants studieux, tandis que, dans la philosophie moderne, nous chercherions en vain un auteur soutenant réellement les doctrines que Büchner attaque. On peut voir, il est vrai, une juste punition dans cette correction infligée à la duplicité de nos philosophes trop bien dressés, qui sont, en quelque sorte, souffletés en pleine rue, sans que le public, livré à ses propres sentiments, éprouve pour eux la moindre sympathie.

Si Büchner est indécis et arbitraire dans l’emploi des concepts particuliers, il ne peut naturellement être regardé comme le représentant d’un principe nettement exprimé, déterminé et positif. Il n’est tranchant, impitoyable et logique que dans la négation ; mais cette négation fortement accentuée n’est aucunement le produit d’une intelligence sèche et purement critique ; elle procède bien plutôt d’un enthousiasme fanatique pour le progrès de l’humanité, pour la victoire du vrai et du beau. Il a suffisamment étudié les obstacles qui entravent le progrès pour les attaquer avec une ardeur impitoyable. Il se peut aussi que bien des choses inoffensives lui paraissent suspectes. Mais tout ce qui n’est pas suspect, tout ce qui ne recèle à ses yeux aucune fourberie, tout ce qui n’est pas une entrave suscitée par la malveillance au progrès scientifique et moral, il croit pouvoir l’utiliser. Büchner est né idéaliste. Il appartient à une famille richement douée du côté de la poésie. Un de ses frères mort prématurément donnait, comme poëte, de grandes espérances ; un autre s’est pareillement fait connaître comme poëte et historien de la poésie ; sa sœur, Louise Büchner, est généralement connue par son remarquable talent littéraire et par ses recueils de poésies des femmes du monde allemandes. Lui-même, — comparable en cela à De la Mettrie, — se distingua comme élève par ses études littéraires, philosophiques, poétiques et par l’éclat de son style. Lui aussi, pour obéir à son père, se voua aux études médicales ; sous ce point de vue encore on peut le