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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/162

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nerveux ». « L’intuition sans voile des conditions matérielles des phénomènes intellectuels nous édifierait plus que n’importe quel résultat obtenu jusqu’ici par l’étude de la nature ; mais les phénomènes intellectuels eux-mêmes resteraient pour nous tout aussi incompréhensibles qu’ils le sont aujourd’hui. « La connaissance astronomique du cerveau, la plus haute à laquelle nous puissions atteindre, ne nous y révèle qu’une matière en mouvement. » Mais si l’on se figurait pouvoir comprendre, à l’aide de cette connaissance, du moins certains phénomènes ou facultés intellectuels, comme la mémoire, la série des idées, etc., on se ferait illusion ; nous n’apprenons à connaître que certaines conditions de la vie intellectuelle, mais nous n’apprenons pas comment de ces conditions provient la vie intellectuelle elle-même.

« Quelle connexion imaginable existe-t-il d’une part entre des mouvements déterminés d’atomes déterminés dans mon cerveau, et d’autre part les faits pour moi primitifs, indéfinissables, incontestables comme ceux-ci : « j’éprouve une douleur, j’éprouve un plaisir ; je perçois une saveur douée, je respire, un parfum de rose, j’entends un son d’orgue, je vois une couleur rouges, et la certitude non moins immédiate qui en résulte : « donc je suis » ? Il est impossible d’entrevoir comment la conscience pourrait naître du concours des atomes. Quand même je donnerais de la conscience aux atomes, je n’expliquerais pas la conscience, et je ne gagnerais rien qui me fit comprendre la conscience unitaire de l’individu.

Cette deuxième limite de la connaissance de la nature est aussi qualifiée d’absolue par Du Bois-Reymond on ne peut se figurer aucun progrès des sciences de la nature, qui la fasse jamais dépasser. Le naturaliste n’en maintiendra pas moins son droit de se former, « par la voie de l’induction, sa propre opinion sur les rapports de l’esprit et de la matière, sans se laisser égarer par les mythes, les dogmes et les systèmes fiers de leur antiquité ».