Aller au contenu

Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/243

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tombés dans un cercle vicieux ? Les forces sont des propriétés, non d’une matière existant en soi, mais « de la chose », par conséquent, d’une abstraction. N’attribuons-nous pas à ce qu’il y a de plus concret en apparence, à la matière, quelque chose qui n’est que l’abstraction d’une abstraction ? Puis, si nous entendons la force dans le sens strictement physique de ce mot, n’est-elle pas alors une fonction de la masse, c’est-à-dire, encore une fois, une fonction de la matière ?

À cela on peut répondre, d’abord, que l’idée de masse, dans la physique mathématique, n’est qu’un nombre. Si j’exprime en kilogrammètres le travail d’une force, le coefficient qui détermine le degré d’élévation est joint à un coefficient qui indique le poids. Mais le poids est-il autre chose que l’effet de la force de pesanteur ? On se figure le poids du corps entier décomposé en pesanteurs d’un nombre de points hypothétiques, et la somme de ces points constitue la masse. Rien de plus ne se rattache et ne peut se rattacher à cette idée. Nous avons donc simplement ramené la force donnée à une somme de forces hypothétiques, aux agents desquelles s’applique tout ce que nous avons dit, plus haut, des atomes. En admettant ces agents, dont nous ne pouvons nous passer et qu’il est impossible de comprendre, nous sommes précisément arrivés à la limite de la connaissance de la nature, dont nous avons parlé dans le chapitre précédent.

Fechner (40) a tenté de donner à la matière une valeur indépendante de la force en la définissant ce qui se fait sentir au tact, « ce qui est palpable ». On lui objecte naturellement que cette palpabilité ne repose que sur la force de résistance (force que l’on peut désigner dans un sens strictement mécanique comme un travail fonctionnel) ; il répond que cette résistance n’est inférée que des rapports de la sensation du tact et d’autres sensations ; qu’elle n’est point, par conséquent, une base expérimentale de l’idée de matière (c’est-à-