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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/276

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Cette influence de la théorie de Darwin sur les savants provient de la simplicité, de la clarté, du fini de la pensée fondamentale, dont le germe se rencontrait déjà dans les expériences et les exigences méthodiques de l’époque actuelle et devait aisément résulter de la combinaison occasionnelle de plusieurs idées de notre temps. Mais la science doit bien plus encore sans doute à la persévérance avec laquelle Darwin étudia une question qui, dès l’année 1837, le maîtrisa puissamment, à son retour d’un voyage de circumnavigation entrepris dans un but scientifique, question à laquelle il consacra dès lors sa vie entière. Les riches matériaux recueillis par ce naturaliste n’ont, pour la plus grande partie, pas encore été publiés ; les preuves les plus convaincantes de ses assertions font encore défaut, et un grand ouvrage, qui paraîtra plus tard, nous exposera dans toute leur étendue, comme il faut l’espérer, les gigantesques travaux de cet homme éminent (56). Bien des savants suspendent leur jugement sur la théorie de Darwin jusqu’à l’apparition de cet ouvrage, et cette prudence n’est point blâmable, car assurément, même dans ce monument de l’activité et de la sagacité humaines, la critique aura fort à faire pour séparer ce qui doit rester d’avec ce qui est transitoire et subjectif. Mais on fera bien de ne point perdre de vue qu’une vérification suffisante de cette remarquable hypothèse ne peut nullement dépendre de ces seuls matériaux ; il faudra les travaux originaux de nombreux savants et peut-être les expérimentations faites par des générations successives, pour confirmer la théorie de la sélection naturelle par la sélection artificielle qui, dans un temps très-court relativement, peut accomplir une œuvre pour laquelle la nature a besoin de milliers d’années. D’un autre côté, la théorie de Darwin a déjà, dans sa forme actuelle, une importance qui dépasse de beaucoup la portée d’une question posée fortuitement. Son recueil d’observations n’a pas la moindre analogie avec les ineptes protocoles de Wagner sur l’authenticité de quel-