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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/313

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sa nature. Le mécanisme qui opère ainsi reste caché à la propre conscience de l’être en qui il se développe ; aussi l’activité humaine et quasi-humaine apparaît-elle, au point de vue d’une observation grossière et non scientifique, comme l’effet immédiat d’une force qui émane de la pensée seule et saisit son objet, tandis que ce n’est en réalité que l’effet très-indirect d’une force extrêmement subtile. Si on laisse de côté les erreurs qui découlent de cette manière de voir, le mécanisme au moyen duquel la nature atteint son but doit à sa généralité, pour le moins, une perfection aussi grande que celle que son rang, comme cas spécial le plus parfait, assigne à la finalité humaine. Il serait facile de démontrer que, même dans les actes les plus élevés de l’homme, le principe de la conservation de ce qui est relativement le plus conforme au but joue encore son rôle, et concourt partout avec les appareils les plus délicats que l’activité spécifique de l’homme fait servir à ses réactions contre les causes extérieures. Même les grandes découvertes et inventions, qui forment la base de la culture supérieure et du progrès intellectuel, sont encore soumises à cette loi générale de la conservation du plus fort, bien qu’elles soient contrôlées d’après les méthodes les plus délicates de la science et de l’art.

Toute la question de la téléologie légitime peut se résumer ainsi on recherche jusqu’à quel point, dans cette disposition de la nature et dans cette action mécanique de la loi de développement, on peut trouver quelque chose de comparable à un « plan de l’univers ». Si nous avons la précaution d’écarter toutes les raisons qui tendent à démontrer l’existence d’un « architecte des mondes », pensant à la façon de l’homme, la question se réduira logiquement à ce point essentiel ce monde-ci est-il un cas spécial parmi d’innombrables mondes pareillement concevables qui seraient demeurés éternellement dans le chaos ou dans l’inertie, ou bien est-il permis d’affirmer que, quelle qu’ait été la consti-