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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/328

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mité toutefois avec le grand ensemble des questions anthropologiques. Ainsi l’on ne traite pas encore l’histoire universelle comme une partie de l’histoire de la nature, quoique l’on sente déjà très-bien que les principes de la lutte pour l’existence y jouent aussi leur rôle.

On peut détruire par la critique ou « dominer » par la spéculation le dualisme de l’esprit et de la nature ; on peut, en se plaçant au point de vue de la science de la nature, poser comme axiome qu’en dernière analyse la vie intellectuelle doit être conçue comme produit des lois générales de la nature ; mais on ne pourra pas empêcher d’établir une distinction entre la nature et l’esprit, tant que nous aurons, pour connaître ces deux domaines, des points de départ différents et des mesures diverses pour en apprécier les phénomènes. Que l’homme ne se soit élevé d’une vie bestiale antérieure à l’état d’homme que grâce à son développement interne, voilà ce que Kant admettait comme évident ; mais il voyait dans l’éclosion de la pensée du moi le véritable moment de la création de l’homme (1). C’est ainsi que, même encore aujourd’hui, l’histoire primitive de l’esprit et de la culture reste la question principale, la sortie de l’homme hors de la série des brutes se comprenant très-bien, d’après la science de la nature, tandis que sa vie intellectuelle demeure toujours un problème, même quand toutes les conséquences de la théorie de la descendance ont été admises. Il fallait en même temps, pour rendre la véritable conception philosophique accessible à un cercle plus étendu d’esprits, un travail préliminaire d’élucidation et d’affranchissement, principalement dans le domaine de la géologie et de la paléontologie.

Les dogmes des révolutions de la terre, de l’apparition successive des créatures, de l’avènement tardif de l’homme, ont été, dès l’abord, opposés au matérialisme et plus encore au panthéisme. Tandis que Buffon, de la Mettrie et plus tard les philosophes allemands de la nature, Gœthe en tête,