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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/515

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progrès des lumières et de l’instruction ont généralement pour résultat d’amener la diminution du nombre et de l’influence des prêtres ; que le nombre des crimes décroît à mesure que s’affaiblit la superstition, inséparable de la foi qui s’attache simplement à la lettre. Nous savons que la foi et l’incrédulité ne modifient pas sensiblement la conduite des hommes dans la société, en tant que cette conduite se manifeste à l’extérieur par des actes d’une certaine importance. Le croyant et l’incrédule agissent moralement ou immoralement, même criminellement, par des causes dont la connexion avec leurs principes n’est que rarement visible et paraît même alors être un effet secondaire de l’association des idées. Les modes du processus psychique différent seuls : l’un succombe à une tentation de Satan ou croit suivre, tout en gardant son bon sens, une prétendue inspiration d’en haut ; l’autre pèche avec une froide frivolité ou dans l’ivresse de la passion. C’est à tort que l’on traite d’hypocrites les criminels dévots les cas où la religion sert de masque sont rares aujourd’hui très-souvent au contraire les actes les plus scandaleux sont unis à des sentiments d’une piété réelle et profonde ; — il est vrai que cette piété est affectée des faiblesses que nous avons définies plus haut par les termes de Mill, aussi bien que celle des dévots irréprochables. Il peut se faire aussi que d’une préoccupation continuelle d’idées religieuses résulte souvent un énervement moral ; mais ce n’est assurément pas toujours le cas, et souvent la foi semble admirablement aiguiser l’énergie d’un caractère. Comment pourrions-nous sans cela nous expliquer l’organisation d’un Luther, d’un Cromwell ? Il n’y a scientifiquement en soi rien de bien constaté sur les effets moraux de la foi et de l’incrédulité ; car la brutalité relativement plus grande de populations esclaves de la lettre, en matière de foi, peut être un effet indirect qui ne prouve rien au fond. C’est précisément chez ces populations que l’irréligion est accompagnée de la plus grande démoralisation, tandis que chez des populations plus rationa-