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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/594

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tion idéale, à l’individu égaré dans son égoïsme. Ainsi le philosophe le plus radical de l’Allemagneest en même temps l’homme dont les pensées et les tendances forment le contraste le plus frappant avec la maxime de l’intérêt de l’économie politique et toute la dogmatique de l’égoïsme. Ce n’est donc pas en vain que Fichte, le premier en Allemagne, souleva la question sociale, qui n’existerait pas si les intérêts étaient les seuls mobiles des actions humaines, si les règles abstraitement exactes de l’économie politique, constituant les seules lois de la nature, dirigeaient éternellement et invariablement la marche des travaux et des luttes de l’humanité, sans que jamais vînt à se faire jour l’idée supérieure, pour laquelle les membres les plus nobles de l’humanité ont, depuis des milliers d’années, lutté et souffert.

« Non, ne nous quitte point, palladium sacré de l’humanité, pensée consolante que de chacun de nos travaux, de chacune de nos douleurs naît pour nos frères une nouvelle perfection, une joie nouvelle que nous travaillons pour eux et que nous ne travaillons pas en vain qu’à la place où maintenant nous nous fatiguons et sommes foulés aux pieds, et — ce qui est pire encore — où nous errons et nous trompons grossièrement, un jour fleurira une génération qui pourra toujours faire ce qu’elle voudra, parce qu’elle ne voudra que le bien ; — tandis que nous, dans des régions supérieures, nous serons satisfaits de nos descendants et retrouverons développes dans leurs vertus les germes que nous aurons déposés en eux et les reconnaîtrons pour nôtres. Enthoùsiasme-nous, perspective de cet avenir, et donne nous le sentiment de notre dignité montre-nous-la du moins dans nos dispositions, encore que notre état présent la contredise. Répands l’audace et un sublime enthousiasme sur nos entreprises, et dussions-nous être brisés, soyons ranimés — pendant que nous soutient la première pensée : j’ai fait mon devoir — soyons ranimés par la deuxième pensée : aucune semence, jetée par moi, ne sera perdue dans