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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/676

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tion dans la conscience dépend toujours d’une relation entre les forces de toutes les excitations appartenant au domaine de la sensation et existant en même temps. Ainsi le même phénomène physique pourrait avoir lieu exactement avec le même effet réflexe, une première fois d’une manière consciente, une seconde fois d’une manière inconsciente. Cela est à noter en même temps pour la théorie des représentations « latentes » ou « inconscientes », sur lesquelles règne encore tant d’incertitude, même à l’époque actuelle. Naturellement il ne s’agit pas d’une « conscience inconsciente », mais tout simplement du jeu inconscient du même mécanisme, qui, dans un autre état d’ensemble, se rattache à l’effet subjectif d’une représentation déterminée. Qu’il y ait, dans ce sens, des représentations latentes, c’est l’ABC de toute psychologie empirique, et un examen rigoureux doit constater que non seulement des actes visant un but quoique inconscients, mais encore des faits d’association de l’espèce la plus variée résultent de ce jeu du même mécanisme, qui est en connexion avec la représentation dans un autre état d’ensemble du cerveau.

Cette incontestable influence de l’état d’ensemble dans le tout relié organiquement nous fait reconnaître avec Wundt qu’il n’est nullement indifférent pour la question de la conscience de savoir si un centre de la moelle épinière est encore en connexion avec le cerveau ou en est séparé[1]. Nous serions aussi d’accord avec lui sur ce point, c’est que, dans la moelle épinière d’un animal qui, par l’effet de son organisation, ne possède pas un cerveau, on doit admettre une conscience plus lucide que dans la moelle épinière, séparée, d’un animal d’une organisation supérieure. En outre, il est indubitable que l’hypothèse d’une conscience dans les centres distincts de deuxième et de troisième rang ne contribue pas du tout à l’explication des mouvements[2]. Par contre, nous différons d’avis avec Wundt, quand il croit que le manque de tout souvenir et celui de tout mouvement spontané qui en résulte[3] chez la grenouille décapitée fournit un argument contre l’existence réelle de la conscience. Sans doute, et Wundt aussi le reconnaît, à chaque conscience semble appartenir une synthèse ; mais celle-ci n’a pas un besoin absolu de s’étendre sur un long espace de temps ni de réunir en une unité des sensations diverses. Dans la simple connexion de l’état nouveau avec l’état précédent gît déjà une synthèse qui rend possible logiquement une conscience. Il faut et il suffit que la sensation ait rapport à un change-

  1. Voir Physiologische Psychologie, p. 714 et suiv.
  2. Wundt, ibid., p.829.
  3. Wundt, ibid., p. 825 et suiv.