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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/92

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Toutefois en s’intéressant aux recherches faites par les peuples étrangers, le savant allemand devait nécessairement s’imprégner de l’esprit qui dirigeait ces recherches, des pensées qui reliaient les détails entre eux. Or, chez les nations les plus influentes, les opinions des XVIIe et XVIIIe siècles en général étaient restées prédominantes, bien que l’on évitât d’en faire ressortir les conséquences avec une franchise trop brutale. En France notamment, Cabanis donna à la physiologie une base matérialiste au moment même où, en Allemagne (depuis 1795), Schiller et Fichte élevaient l’idéalisme à son point culminant. Cabanis, il est vrai, considéré comme philosophe, n’était rien moins que matérialiste (44). Il penchait vers un panthéisme se rattachant à la doctrine des stoïciens, et il regardait d’ailleurs comme impossible la connaissance des « causes premières » (on pourrait dire, selon les expressions de Kant, la connaissance de la « chose en soi ») (45). Il attaque souvent la théorie d’Épicure. Mais, dans l’étude scientifique de l’homme, il fraie les voies à la méthode somatique. Dans le phénomène ou, pour nous servir de son langage, quand on s’en tient aux « causes secondes », qui seules sont accessibles à l’homme, nous trouvons que partout les fonctions intellectuelles dépendent de l’organisme, et la sensation est la base de la pensée comme de l’action. Or son ouvrage a pour but de démontrer l’existence de cette corrélation, et ses lecteurs, ses élèves s’attachent naturellement à ce qu’ils rencontrent en premier lieu, au but et à l’ensemble de son œuvre, sans trop se préoccuper de propositions préliminaires ou émises en passant et relatives à la philosophie. Depuis Cabanis, on a donc en général ramené les fonctions intellectuelles à l’activité du système nerveux en physiologie, quelles que puissent d’ailleurs avoir été les opinions de tels ou tels physiologistes sur les causes dernières de toutes choses. Une loi, qui règle les sciences spéciales, veut que la matière de la connaissance